De nombreux ménages réalisent eux-mêmes leurs travaux de rénovation (près de 40 % d’après l’enquête TREMI de l’ADEME parue en 2018). Cette recherche en sociologie a donc pour objectifs de mieux connaître et comprendre les pratiques d’auto-rénovation, d’observer les écosystèmes en place, et de comprendre à quels moments du processus les enjeux environnementaux (en l’occurrence la consommation énergétique et l’impact carbone) sont pris en compte ou délaissés. La recherche est circonscrite aux chantiers d’auto-rénovation de propriétaires-occupants de maisons individuelles qui entament ces travaux à l’acquisition de leur maison. Ma thèse permet de mettre en avant quatre grands résultats. En premier lieu, l’ambition de la rénovation dépend fortement du rapport à l’environnement des ménages et des connaissances qu’ils ont du fonctionnement d’un bâtiment avant l’achat. Cela devrait avoir une incidence sur les instruments politiques à venir pour accélérer la rénovation énergétique. En second lieu, deux grands types de motivations à l’auto-rénovation apparaissent. Le premier groupe montre une très forte conviction environnementale et trouve que les dispositifs publics en matière de rénovation ne vont pas « assez loin » (matériaux financés, rénovation par gestes, fiabilité des entreprises RGE, etc.). Faire eux-mêmes leur paraît alors être une option intéressante pour « faire mieux ». Un second groupe choisit l’auto-rénovation par contrainte budgétaire. Faute de moyens financiers suffisants, ils acquièrent une maison peu chère où des travaux sont nécessaires, et les réalisent eux-mêmes. Bien évidemment, les attentes de ces deux populations sont très différentes. Troisième résultat, ma thèse montre que les ménages pallient le manque de capital économique en acquérant une partie des ressources indispensables aux travaux (main-d’œuvre, matériaux, compétences) par des moyens non financiers. Ainsi, la rénovation ne va pas être pensée juste en fonction du budget, mais aussi par rapport au temps dont les ménages disposent et au réseau relationnel (amis, famille, etc.) qu’ils peuvent mobiliser. C’est tout l’écosystème de la rénovation qui est ainsi réinventé. Enfin, quatrième résultat, « auto-rénovation » ne signifie pas que les professionnels ou artisans seront complètement absents de ces chantiers. En fait, l’analyse montre qu’ils peuvent intervenir, mais sur des moments clés ou des gestes techniques précis. Pour ces professionnels, il s’agit là aussi de s’adapter, plus ou moins facilement pour certains, à une nouvelle clientèle, dont les attentes et les fonctionnements sont différents (les délais sont plus compliqués à estimer ; parfois, peuvent aussi se poser des questions juridiques ou d’assurance).